L’histoire simple, c’est l’histoire de Denis Uvier. Denis a été sans-abri dans sa jeunesse, il est devenu éducateur de rue à Charleroi. Depuis plusieurs dizaines d’années, il est une figure de la ville. Il travaille pour et avec les sans-abris. J’écris « sans-abri », car c’est ainsi qu’on les appelait encore dans les années 1980 et début des années 1990. On préfère aujourd’hui les appeler SDF, Sans domicile fixe. Sans domicile plutôt que sans-abri. « Sans domicile », des mots de l’administration, « sans-abri », mot qui exprime la détresse d’une situation.
Le plein d’humanité
L’histoire pleine d’humanité, c’est Denis qui, après un parcours difficile, s’en est sorti avec l’aide d’associations comme le MOCmouvement composé de plusieurs organisations chrétiennes comme un syndicat, une mutuelle, une organisation de femmes, de jeunes..., la CSCConfédération des Syndicats Chrétiens. Sa couleur: le vert., la FUNOCFormation pour l'université ouverte de Charleroi. Et surtout, surtout, avec l’aide de Paul Trigalet, le « père » en quelque sorte. Paul Trigalet, prêtre-ouvrier, autre figure de Charleroi. Paul Trigalet, un militantpersonnes qui s'engagent et qui agissent pour défendre une idée, une cause. pour le logement pour tous et toutes, mais pas seulement. Paul Trigalet était aussi un militantpersonnes qui s'engagent et qui agissent pour défendre une idée, une cause. de l’éducation populaire, de l’éducation permanente. L’éducation permanente que l’on peut définir comme « ni la culture pour tous, ni la culture pour chacun, mais « la culture par chacun et avec chacun pour le développement de tous. » Et Denis a hérité cela de son “père” Paul. Denis écrit :
(…)
Merci à Paul Trigalet qui deviendra
À perte de vue et pour toujours,
Père et maître spirituel, le temps d’une vie
Le plein de poésie
Le livre J’appartiens à la rue est comme l’histoire de Denis, plein de poésie. Car Denis écrit, écrit beaucoup. Tous les jours ou presque sur sa page Facebook, il publie de longs poèmes. Denis fait parfois des fautes d’orthographe, mais ça, Denis s’en fout. Pour qui l’a déjà entendu, Denis sait manier le verbe et sa verveparler ou écrire avec talent et enthousiasme est aussi poétique. Ses longs poèmes sont sur la vie des sans-abris, sur la douleur ou l’injustice. Des poèmes lucides, réalistes, sur ce monde dur et violent. Ainsi sur les sans-abris qui peuvent parfois être aussi des voleurs :
Toi qui dehors passes la nuit
Tu regardes les lumières
Ébloui, tu sors, t’amuses
La nuit tous les chats sont gris
Idem pour les sans-abris
Ils recherchent leur proie
Poussés par le besoin de manger
Boire ou fumer, de se droguer aussi
C’est toi leur proie peut-être
Car tu serais le seul moyen
De prendre le droit de s’amuser
Un extrait d’un autre poème où c’est le Denis militant contre toutes les injustices qui parle:
(…) J’ai regardé se lever l’Europe des luttes
Hommes et femmes sans-abris, sans-papiers
Surtout sans voix
Minimexés, chômeurs, ouvriers, (…)
Haïku
La vérité de Denis, de son combat, il l’exprime bien avec sa poésie. Denis écrit de longs poèmes, oui, et pourtant, souvent, quelques vers de ces longs poèmes ressemblent à un haïku. Le haïku est un petit poème japonais qui parle de l’insaisissable, du côté éphémère des choses. Lisons Denis :
(…)
Ah, le chemin noir sous l’orage
Si lumineux au midi de l’été
Il ne frémira plus sous tes pas
Lisons-le encore :
(…)
Pour qu’un jour sur un terrain très vague
Enfin je te trouve dans ces grands lointains
Et te demande pourquoi jamais
Ton histoire tu me l’as donnée
Les spécialistes de poésie disent que le haïku favorise le lien social, l’écoute et le dialogue. Il transmet la paix et la bienveillance. Le livre J’appartiens à la rue comme la vie de Denis Uvier, c’est en ce sens un haïku.
J’appartiens à la rue
Denis Uvier avec Marcel Leroy
Editions du BASSON
15 euros