Une semaine de folie, un vote historique, un arrondissement scindé en Commission, un roi qui calme le jeu, deux «sages» appelés à l’aide, quatre présidents de partis francophones qui parlent presque d’une même voix, quelques soupçons de mise en scène, un formateur reconduit dans sa mission, une orange bleue en panne… 155 jours sans gouvernement.
Photo: Belga
Ce 12 novembre, cela fait 155 jours que la Belgique est sans gouvernement. Et pourtant, lundi dernier, les négociateurs semblaient plutôt confiants. Les partis qui négocient sont les libéraux flamands (OpenVLDLe nom du parti libéral flamand) , les libéraux francophones (MRMouvement Réformateur , associé au FDF, parti francophone bruxellois), les socio-chrétiens francophones : le CDHCentre démocrate humaniste, anciennement Parti social chrétien (PSC) et les socio-chrétiens flamands (le CDV associé au NVASigle de la Nieuw-Vlaamse Alliantie. On prend la première lettre de chaque mot. En français: Nouvelle Alliance flamande., le parti régionaliste du Sud). Les négociateurs de ces partis avaient avancé sur des dossiers difficiles. Il y avait un accord sur presque tout. Presque. Si les négociations sont aujourd’hui en panne, c’est encore et toujours à cause d’un dossier communautaire : le dossier BHV.
Les aventures de la semaine
Mais lundi dernier, les négociateurs devaient avancer sur le communautaire. C’est-à-dire d’abord avancer vers une solution sur le dossier BHV. Ce dossier BHV n’est pas nouveau. Les Flamands veulent scinder l’arrondissement électoral de Bruxelles-Hal Vivorde. Les francophones ne veulent pas de cette scission.
Comme aucun accord n’était possible, une Commission de l’Intérieur de la Chambre avait été chargée d’examiner les différentes propositions. Mais cette Commission est à majorité flamande. Une conférence interministérielle qui réunit 6 francophones et 6 néerlandophones se penche donc aussi ce dossier.
Depuis le 9 octobre, le Parlement a repris ses séances. Alors que le gouvernement n’est pas encore en place. Les partis flamands menaçaient donc de voter seuls en Commission la scission de BHV si leurs négociateurs n’avaient pas un début de solution. Ils faisaient ainsi pression sur tous les partis qui négocient pour former le gouvernement.
Lundi 5 novembre après-midi donc, la Commission de l’Intérieur s’est réunie. Et, comme on s’y attendait, Piet De Crem a invité les députés à passer au vote. Aussitôt, les députés francophones sont sortis pour protester. Et les députés flamands ont voté seuls la scission de l’arrondissement de Bruxelles-Hal-Vilvorde. Avec les voix du Vlaams Belang"Intérêt flamand" en français, nouveau nom du Vlaams Blok, parti d'extrême droite flamand, le parti d’extrême droite. Seule, la représentante du parti GroenEcologistes flamands. Groen veut dire vert., les écologistes flamands, s’est abstenue.
Un vote historique, qui débloque
Ce vote a provoqué l’indignation au sud du pays. Le soir même, les quatre présidents des partis francophones se sont exprimés. Ils ont dénoncé l’agression flamande. Et le lendemain, la Communauté française a voté le «conflit d’intérêt». Cette procédure va empêcher, pour un temps, les négociations communautaires. Le roi a convoqué Yves Leterme, le formateur. Il l’a pressé de continuer les négociations pour former un gouvernement au plus vite. Mais il l’a déchargé du communautaire. Le roi en a chargé les présidents de la Chambre et du Sénat. Bref, le vote sur BHV curieusement va peut-être permettre de former assez vite un gouvernement. Au point que certains ont dit que le formateur et les négociateurs auraient « mis en scène » ce vote. Histoire de mettre au frigo la patate chaude de BHV…
Nicolas Simon