Au temps des smartphones, facebook et twitter, il y a encore des ateliers d’écriture. On peut même dire qu’ils ont toujours un certain succès. Un atelier d’écriture est un lieu où l’on s’amuse ensemble à écrire. A écrire quoi ? Un peu de tout : des poèmes, des petites histoires et plus généralement des textes courts.
Des gens, comme vous et moi, se rassemblent autour d’un ou deux animateurs. Ces animateurs donnent des petits trucs, des astuces pour écrire sur tel ou tel sujet. Il y a des petits trucs très simples. Par exemple, le questionnaire de Proust, en répondant à une vingtaine de questions, on fait son autoportrait : ce que je préfère chez les hommes, c’est… ; ma principale qualité, c’est … ; mon héros préféré, c’est … ; etc. A partir des réponses, on écrit un texte. De même, le portrait chinois : si j’étais un objet, je serais… ; si j’étais un oiseau, je serais… ; etc.
Des trucs utilisés par les poètes
Et puis, il y a les trucs utilisés par les poètes. Prenez, par exemple, cet extrait de poème de Guillaume Apollinaire tiré de Poèmes à Lou :
Adieu !
L’amour est libre il n’est jamais soumis au sort
O Lou le mien est plus fort encor que la mort
Un cœur le mien te suit dans ton voyage au Nord
Que remarque-t-on d’abord ? Le même son « or » à la fin de chaque vers. C’est la rime utilisée par beaucoup de poètes. Cela fait une musique et cela oblige le poète à écrire en partant de mots qui ont le même son. Avec un dictionnaire de rimes, on peut donc faire son propre poème. Que remarque-t-on encore ? Si on prend la première lettre de chaque vers, on trouve le prénom « Lou » et le recueil de poème s’appelle justement Poèmes à Lou. Cela oblige le poète à trouver des mots qui commencent par une certaine lettre. C’est ce que l’on appelle l’acrostiche. Avec un dictionnaire, on peut aussi faire un acrostiche en prenant, par exemple, son prénom. Rime et acrostiche sont des exemples de contraintes. Dans les ateliers d’écriture, on utilise beaucoup de contraintes.
Des contraintes
Dans les années 1960, Jean Ricardou et Claudette Oriol-Boyer ont théorisé les contraintes utilisées en atelier d’écriture. Et ils en ont aussi inventé. Un truc souvent utilisé est de partir d’un ou de plusieurs mots et d’y associer d’autres mots. Comment ? Un mot vous fait généralement penser à d’autres choses, d’autres idées vous viennent à l’esprit. Un mot peut aussi vous faire penser à d’autres mots qui sonnent à peu près de la même façon. C’est ce que les spécialistes appellent l’axe idéel et l’axe matériel.
Prenons le mot « jaune ». Pour les idées, il peut faire penser à : couleur, soleil, tournesol, robe, matin, pastis, gréviste, annuaire, etc. Pour les sons approchants, il peut faire penser à : faune, amazone, clone, cyclone, anémone, la ville de Crémone, carbone, magnétophone, smartphone, téléphone, etc. Tous les membres de l’atelier participent à cette « mise en mots ».
Mise en texte
Puis on fait la « mise en texte ». On écrit seul ou à deux un petit texte en choisissant dans les deux séries de mots « idéels » et « matériels ». On peut évidemment ajouter d’autres mots, s’aider d’autres textes ou d’un dictionnaire de rimes. On lit ensuite aux autres son histoire. On peut ensuite prendre des « bouts » d’histoire des participants pour faire un texte commun. Car un atelier d’écriture, c’est un lieu où l’on travaille avec les autres, on n’écrit pas « tout seul dans son coin ».
En atelier d’écriture, on n’est pas propriétaire de son texte, on le partage, on peut copier et même co-piller, voler dans les textes des autres. On imite aussi. Par exemple, le haïku est souvent utilisé en atelier d’écriture. Le haïku est une forme japonaise de poésie. C’est très court, ça ne décrit pas quelque chose, c’est fait pour partager des sensations tout en gardant une certaine distance avec ces sensations. Un haïku très célèbre est :
Dans la vieille mare,
une grenouille saute,
le bruit de l’eau.
Chacun peut faire son haïku :
Ce matin, la pluie,
L’arbre nu,
L’oiseau meurt.
On peut aussi faire son propre poème sans l’écrire… On choisit des vers de poèmes différents et on les « colle » ensemble pour en faire un nouveau. Il suffit d’utiliser internet et un traitement de texte ! Il y a ainsi des dizaines de « trucs » pour créer des textes : partir des mots pas des idées, imiter, co-piller. Mais attention ! On ne fait pas des ateliers d’écriture pour devenir un grand écrivain. On fait ça avant tout pour s’amuser. Et puis, cela donne envie de lire : écrire pour aller lire. Car comme le dit avec humour Le chat de Philippe Geluck : Celui qui a inventé l’écriture, il a inventé la lecture juste après.
Liens utiles
44 petits ateliers d’écriture http://www.ac-nice.fr/ienash/file/44-petits-ateliers-d-ecriture.pdf
Une liste de contraintes sur le site de l’Oulipo http://oulipo.net/fr/contraintes
L’atelier d’écriture, qu’est-ce que c’est ?
http://www.uvp5.univ-paris5.fr/TFLR/Ac/AffFicheT.asp?CleFiche=8102&Org=QUTH&NivChemin=L3
L’atelier d’écriture à l’école http://www.gfen.asso.fr/fr/ateliers_d_ecriture_en_milieu_scolaire
Explication d’un atelier d’écriture :
Lire pour écrire Claudette Oriol-Boyer
http://www2.ac-lyon.fr/centres/delay/IMG/pdf_Lire_pour_ecrire_Oriol-Boyer_reduit.pdf
Les écritures d’invention par Claudette Oriol-Boyer
http://www.lettres.ac-versailles.fr/IMG/pdf/Conference_de_Claudette_Oriol.pdf
Beaucoup d’informations sur les ateliers d’écriture sur le site Pearltree, l’inscription est gratuite http://www.pearltrees.com/#/N-u=1_602441&N-fa=4836703&N-s=1_6442677&N-f=1_6442677&N-p=59937808
Groupe belge d’éducation nouvelle http://www.gben.be/spip.php?article99
Groupe français d’éducation nouvelle http://www.gfen.asso.fr/fr/accueil
Jean Ricardou http://fr.wikipedia.org/wiki/Jean_Ricardou
Vos commentaires
René Beguin
Le 20 novembre 2015 à 22:39
Bonjour,
Je découvre par la lecture les haikus. J’aimerais apprendre à en créer dans le quotidien.
Je cherche un atelier d’écriture en Belgique qui m’y aiderait. Merci de m’informer des possibilités et des conditions.
A vous lire.
Cordialement,
René Beguin
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