mardi 23 juillet 2024

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Des milliers de chômeurs exclus

Combien de chômeurs sont visés par cette mesure? C’est difficile et même impossible de répondre à cette question de façon précise. L’Onem parlait d’abord de 16 900 puis de 30 000 exclusions. Selon le syndicat FGTB, 31.500 chômeurs francophones ne touchent plus d’allocation d’insertion depuis le 1er janvier. 33% des exclus seraient des chefs de famille, 10% seraient des isolés et 57% seraient des cohabitants. Ce sont évidemment les anciennes régions industrielles qui sont les plus touchées car il y a plus de chômeurs de longue durée. En janvier, il y aura au total 7 000 exclus à Liège et 5 000 à Charleroi. Cette mesure fait donc beaucoup de dégâts sociaux. Le syndicat CSC parle d’une « hécatombe sociale ». Car les exclusions ne font que commencer. Quels chômeurs sont concernés ? Les chômeurs exclus au 1er janvier sont des personnes qui touchaient des allocations d’insertion. C’est-à-dire des allocations de l’ONEm sur base de leur formation et pas de leur carrière professionnelle. Or, depuis le 1er janvier 2012, ces allocations d’insertion sont limitées dans le temps: 3 ans maximum. Les premiers chômeurs sont donc exclus à partir du 1er janvier 2015. Mais d’autres suivront. Quelques exemples Un jeune s’inscrit au chômage après l’école. Après un stage de 12 mois, il touche des allocations d’insertion. S’il ne trouve pas d’emploi, il est exclu après trois ans ! Un autre exemple ? Une femme n’a jamais pu obtenir de contrat à temps plein et bénéficie d’une allocation complémentaire de revenus. Beaucoup de femmes travaillent à temps partiel dans les cafés, les restaurants, les supermarchés ou encore dans des entreprises de nettoyage, ou comme femme de ménage chez des particuliers. Et ces femmes ne parviennent pas à obtenir le droit à des allocations de chômage sur base de leur travail. Un autre cas encore: un chômeur qui a eu des contrats de travail de courte durée ou des intérims, il n’a jamais pu travailler assez longtemps pour toucher des allocations sur base de son travail. Il n’y a donc pas que les jeunes qui sont exclus, il y a aussi des personnes de 35, 40, 45 ans… Il n’y a pas que des isolés qui sont exclus; il y a aussi des chefs de famille. Un tiers des exclus sont des chefs de famille. Et seulement 10 % sont des isolés. Qui a décidé cette mesure? Ce n’est pas le gouvernement actuel, le gouvernement Michel qui a pris cette mesure, mais le gouvernement fédéral précédent, le gouvernement Di Rupo. La mesure a été décidée en juillet 2011. A l’époque, le pays était en crise. Les partis politiques n’arrivaient pas à trouver un accord pour faire un gouvernement. La crise durait depuis 541 jours ! Pour trouver enfin un accord et former un gouvernement, six partis ont négocié: les libéraux, les chrétiens, les socialistes. Certains de ces partis, surtout les libéraux, voulaient limiter dans le temps toutes les allocations de chômage. Pour trouver un accord de gouvernement, les partis, qui étaient contre, notamment les socialistes francophones, ont accepté de limiter dans le temps les allocations d’insertion. Le gouvernement d’alors a donc prévu de limiter ces allocations d’insertion à trois ans maximum à partir du 1er janvier 2012. C’est donc le 1er janvier 2015, trois ans plus tard, qu’il y a les premiers exclus. Pourquoi les socialistes ont-ils changé d’avis ? Aujourd’hui, Elio di Rupo n’est plus premier ministre. Il est président du Parti socialiste et donc dans l’opposition. Et il a déclaré: « La mesure était une demande 100 % libérale, proposée par les libéraux flamands et soutenue par les libéraux francophones. C’est une mauvaise mesure que je regrette. Nous étions convaincus que ça permettrait aux jeunes de trouver un emploi, il faut avoir le courage de reconnaître que c’est une erreur. Mais que le gouvernement actuel cesse de dire que c’est la faute de Di Rupo. Changez la mesure et vous aurez les voix du parti socialiste. » Il y a pourtant bien longtemps que les syndicats et des associations comme la Ligue des Familles dénoncent cette mesure : depuis…2012. Or, en février 2014, Elio Di Rupo qui était premier ministre défendait encore cette mesure d’exclusion. Il disait dans une interview: « Les allocations d’insertion concernent des gens qui n’ont jamais ou pas assez cotisé à la sécurité sociale. C’est un cas unique au niveau international. » Mais Elio Di Rupo rappelait, dans la même interview, que le PS avait dû faire des compromis avec les autres partis : « Pour ceux qui ont travaillé par le passé, et contrairement à ce que demandaient certains partis politiques, il n’y a aucune limitation des allocations de chômage dans le temps. C’est une décision de six formations politiques. On supprime les allocations d’insertion après trois ans mais le PS a prévu des exceptions qui permettent d’échapper à l’exclusion. » Le gouvernement va-t-il reculer ? Elio Di Rupo demande aujourd’hui au gouvernement Michel de retirer la mesure d’exclusion. Mais il y a peu de chance que le gouvernement Michel le fasse. Dans le gouvernement Michel, il y a les libéraux francophones, les libéraux flamands et les nationalistes flamands de la NVA. Ce sont des partis qui ont demandé ou défendu cette mesure d’exclusion. Et dans le gouvernement Michel, seuls les socio-chrétiens flamands de la CD&V défendent un peu moins cette mesure. D’ailleurs, le gouvernement Michel a pris une nouvelle mesure contre les chômeurs. Jusqu’à présent, on peut s’inscrire à l’ONEm pour toucher des allocations d’insertion jusqu’à l’âge de 30 ans. Le gouvernement Michel a décidé que l’on ne pourra plus le faire après l’âge de 25 ans. Cela veut dire que des jeunes qui sortent des études après 25 ans n’auront jamais droit aux allocations d’insertion. Les CPAS vont-ils venir en aide à tous ces exclus du chômage? Les personnes qui perdent leurs allocations d’insertion demanderont le revenu d’intégration au CPAS ou un autre type d’aide. Mais les CPAS risquent de ne pas pouvoir accepter toutes ces demandes. Faute de moyens. Et puis, les CPAS n’accordent pas automatiquement un revenu d’intégration sociale. Ils font une enquête sur les revenus de la personne et de sa famille. Par exemple, les personnes qui vivent avec un conjoint ou des parents qui ont déjà un certain revenu n’ont pas droit au revenu minimum du CPAS. On ne sait donc pas combien de chômeurs exclus auront droit à l’aide des CPAS. Mais on sait que les conséquences de la mesure seront, une fois de plus, les plus catastrophiques pour les femmes seules ou vivant seules avec des enfants. Cette mesure est-elle juste et efficace pour lutter contre le chômage? Cette mesure va certainement effacer des chômeurs des statistiques. Mais va-t-elle faire reculer le chômage? Encore une fois, cette mesure s’attaque aux chômeurs. Pas au chômage. L’idée qui est derrière cette mesure est très dangereuse. On estime que les chômeurs profitent du système. Et qu’il suffit de supprimer leurs allocations pour qu’ils trouvent un emploi. C’est une idée fausse car le problème, c’est qu’on manque précisément d’emplois. Si on supprime les allocations d’insertion aujourd’hui, on risque demain de limiter toutes les allocations de chômage.

Canal C explique clairement l’exclusion des chômeurs et prend l’exemple de Namur

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