«
Papa, c’est quoi la Constitution européenne?». «File
dans ta chambre», a-t-on envie de répondre à l’enfant.
Ouf! On est sauvé. Quelques mots tout de même. D’abord, ce
n’est vraiment une Constitution. Il s’agit d’un traité.
C’est un accord signé par les 25 chefs d’Etat et de gouvernement
de l’Union européenne. Pour devenir réalité, le traité doit être
ratifié par tous les pays. Soit les parlements nationaux donnent leur
accord. Soit on demande l’avis de la population. Comme cela va se faire
en France. Mais pour la Constitution européenne, c’est plus compliqué.
Le texte du traité a été préparé par une assemblée
d’élus européens et nationaux, de représentants de
la Commission européenne et des pays membres. Le texte a été ensuite
modifié par les chefs d’Etat et de gouvernement. Voilà pour
le traité. Il crée donc une constitution pour l’Europe.
Une
constitution est un ensemble de lois fondamentales d’un Etat. Un contrat
entre ceux qui gouvernent et ceux qui sont gouvernés. Une constitution
garantit les droits des citoyens. Une constitution signale qui a tel ou tel
pouvoir sur la société. Qui décide des lois ? Qui les
applique ? Qui juge de l’application de la loi? Comment sépare-t-on
ces différents
pouvoirs pour éviter que l’un influence l’autre? Par exemple,
comment éviter que le politique n’influence la justice ? Il y
a tout cela dans la constitution européenne. Mais, direz-vous, l’Union
européenne, n’est pas un Etat? Et non, ce n’est pas un Etat.
C’est bien pour cela que la Constitution s’appelle traité.
Mais c’est plus qu’un autre traité européen. Le texte
parle des «citoyens européens», des «valeurs» et
des «objectifs» de l’Union européenne. Il a donc bien
une portée constitutionnelle. La difficulté ne vient pas seulement
du nom. L’Union européenne, ce n’est pas un Etat mais 25…
Le texte de la constitution doit donc traiter non seulement des rapports entre
les pouvoirs de l’Union et les 450 millions de citoyennes et citoyens
européens. Mais
aussi des rapports entre l’Union et les 25 pays membres. Et donc,
le texte du traité est long : 475 pages de lignes le plus souvent serrées.
Ceci dit, la Constitution belge fait 70 pages (sans les modifications). Et
donc, le texte du traité est compliqué, très compliqué.
Car pour trouver un accord, il a fallu contenter un peu tout le monde. Ceux
qui sont pour que les Etats nationaux gardent du pouvoir et ceux qui sont pour
que
l’Union soit plus forte. Ceux qui sont pour une économie où tout
est soumis à la concurrenceXcompétition entre entreprises pour être le plus rentable et gagner des marchés. Et ceux qui sont pour une Europe plus sociale.
Le débat français signale que le texte du traité peut être
interprété de bien des façons. Comment choisir entre ceux
qui disent oui au traité constitutionnel et ceux qui disent non ? Peut-être
en voyant les forces sociales qui portent telle ou telle position. Ou encore…
en lisant les 475 pages du Traité… dans votre chambre, par exemple.
Thierry Verhoeven