Jeudi 11 mars, le débat sur le port du voile a repris de plus belle. Ce jour-là, la cour d’appel de Mons a rendu un jugement qui a fait beaucoup de bruit. Ce tribunal a en effet autorisé une enseignante à donner ses cours voilée. Au nom de la liberté de pensée et de la liberté religieuse.
Nuran Topal est une enseignante de mathématiques et de sciences. Elle porte le voile depuis ses 12 ans. Elle a toujours enseigné voilée, dit-elle. Elle travaille à la Garenne, une école de Charleroi. Le pouvoir organisateur de cette école est la Ville de Charleroi. Il interdit à ses enseignantes de donner cours en portant le voile. Nuran Topal introduit donc un recoursfaire un recours, c'est faire appel à une institution (justice, ministère,...) contre une décision officielle qu'on pense injuste. en justice. Elle estime que son apparence ne devrait pas être considérée comme contraire au principe de neutralité. Elle affirme qu’elle a toujours été neutre dans ses cours. Nuran Topal est actuellement en congé de maladie. Suite au jugement, elle devrait être réintégrée dans l’école.
De nombreuses réactions
La procédure n’est pas encore terminée mais le jugement a déjà provoqué de nombreuses réactions. Chez les pouvoirs organisateurs des écoles et chez les hommes politiques. La plupart disent qu’il faut très vite clarifier le décret "neutralité" de la Communauté française. Ce décret impose aux enseignants de rester neutres dans leurs cours. En effet, les enseignants ont un rôle d’autorité sur les enfants. Ils ne peuvent donc pas les influencer. Ils ne peuvent pas par exemple, dire pour qui ils votent. Si une enseignante porte un voile, une croix, cela montre à quelle religion il appartient. Une enseignante, quand elle est voilée, cesse-t-elle automatiquement d’être neutre ? Cela, le décret ne le précise pas. Il est donc urgent de le clarifier.
Proposition de loi
D’autres hommes politiques veulent une loi pour régler une fois pour toutes le problème du port du voile à l’école.
Actuellement, les écoles sont libres d’accepter ou de refuser des élèves voilées. Les cas d’enseignantes voilées sont plus rares. Il n’y a donc pas actuellement de décision politique pour autoriser ou pour interdire les signes religieux dans les écoles et dans les lieux publics en général.
Il y a bien des propositions de loi, mais elles concernent plus les élèves que les professeurs. Suite au jugement du 11 mars, le sujet est remis sur le tapis à tous les niveaux de pouvoir…
Le CDHCentre démocrate humaniste, anciennement Parti social chrétien (PSC) veut mettre en place rapidement un décret qui réglemente les signes religieux chez l’enseignant. Le CDH propose d’interdire les signes religieux chez les élèves du primaire. Il propose aussi que les écoles puissent continuer à autoriser ou à interdire les signes religieux, mais sur base d’une loi. Pour éviter que la justice puisse s’opposer à cette décision de l’école.
Le MRMouvement Réformateur veut déposer une proposition pour régler les insuffisances du décret "neutralité" actuel. Il accuse le PSParti socialiste et le CDH de vouloir faire traîner les choses.
Ce qui est sûr c’est que le débat est passionné. Et que la solution sera délicate à trouver. Il y a des différences de points de vue à l’intérieur même des partis. Certains défendent d’abord la liberté individuelle et la liberté religieuse. D’autres pensent que la religion doit rester privée. Et que l’Etat, les écoles, les institutions officielles doivent rester laïques, c’est-à-dire sans aucun signe religieux.
Lydia Magnoni