Une femme sur deux n’a pas les connaissances élémentaires sur la maladie – Photo: Belga

Le 1er décembre dernier, lors de
la journée mondiale de lutte contre
le sida, on a beaucoup parlé de la situation particulièrement
dramatique des femmes. Elles sont de plus en plus touchées par cette
terrible maladie. Cette évolution est liée aux nombreuses discriminationsfaire des discriminations, c'est traiter différemment (et plus mal) une personne ou un groupe par rapport aux autres personnes ou au reste de la collectivité.
dont elles souffrent encore.

«Allez-vous enfin m’écouter ?» C’est avec cette
question que la journée mondiale de la lutte contre le sida 2004, organisée
le 1er décembre dernier, a voulu attirer l’attention sur une évolution
particulièrement inquiétante. Une proportion de plus en plus
grande de femmes est touchée par la maladie.

En 1985, le pourcentage
des femmes porteuses du virus était de 35%.
Aujourd’hui, elles sont plus de 50%. Dans certaines régions, comme
l’Afrique subsharienne, 57% des porteurs du virus VIH sont des femmes.
Autrement dit, 75% des femmes séropositives de la planète vivent
dans cette région. Et celles qui sont atteintes sont de plus en plus
jeunes. Toujours en Afrique subsaharienne, 76% des personnes âgées
de 15 à 24 ans sont des femmes. Dans des pays comme l’Afrique
du Sud, la Zambie et le Zimbabwe, les jeunes femmes ont de trois à six
fois plus de (mal)chance d’être contaminées que les jeunes
hommes.

Du manque d’information à la prostitution

Pour les experts, la
première raison de cette évolution, c’est
le manque d’information. D’après une récente enquête
de l’UNICEF, dans les pays fortement touchés par le sida, une
femme sur deux ne possède pas les connaissances élémentaires
sur la maladie. D’après une autre étude, menée parmi
des jeunes mariées d’Uttar Pradesh, en Inde, 71% des femmes (dont
toutes s’étaient mariées avant la puberté) ne savaient
rien au sujet des rapports sexuels lorsqu’elles avaient commencé à vivre
avec leur mari. Et 83% ne savaient pas comment une femme devenait enceinte.
Dans certaines sociétés, on impose une ignorance dangereuse aux
filles et aux jeunes femmes. On préfère généralement
qu’elles ne sachent pas grand-chose des questions sexuelles pour mieux
les contrôler et les soumettre.

Cet accès limité à une
information vitale reflète
une situation plus large: les discriminations et les violences dont les femmes
continuent de souffrir dans le monde. La plupart des femmes sont infectées
par le virus à cause du comportement à haut risque des hommes.
En clair, trop souvent, les hommes ne prennent aucune précaution. Comme
ils n’emploient pas de préservatifs, ils contaminent les femmes.
La situation est aggravée par le fait que, dans bien des régions
du monde, la femme est mise en situation d’infériorité face à la
sexualité.

C’est évidemment dans la prostitution que la
situation est la plus grave. Poussées par la pauvreté, des millions
de femmes se prostituent. Et leurs clients leur imposent des rapports sans
préservatifs.
Ces pratiques multiplient les effets de la contagion. En effet, beaucoup de
ces clients sont mariés ou ont une partenaire régulière.
En Thaïlande, par exemple, une étude a montré que 50% des
nouveaux cas de séropositivité s’étaient déclarés à la
suite de rapports sexuels entre conjoints.

Dans les pays riches aussi

Partout dans le monde, l’épidémie
progresse davantage chez les femmes dans un contexteLes circonstances, les conditions, les explications d'un événement, d'un fait, d'une action de graves inégalités.
C’est
aussi vrai dans les pays industrialisés de l’Europe occidentale
et de l’Amérique du Nord. Un quart environ des personnes séropositives
sont des femmes. Et le VIH progresse plus chez des femmes qui appartiennent à des
groupes marginalisés de la population. Notamment les immigrants et les
réfugiés. Aux Etats-Unis, les femmes afro-américaines
et hispaniques, par exemple, constituent moins d’un quart de la population
féminine. Pourtant, à la fin du siècle dernier, elles
représentaient 80% des cas de SIDA enregistrés chez les femmes.
Le sida reflète donc l’état de la société.
La persistance des inégalités et des discriminations renforcent
ses conséquences meurtrières.

Olivier Brouet