Ce qu’en dit Daniella Casagrande
30 ans ! Une page se tourne et hop, d’un seul coup 30 années qui s’envolent.(Je cours vite dans la salle de bains pour vérifier dans le miroir si c’est vrai et… Effectivement !) 30 ans pour l’Essentiel et, pour ma part, 10 de plus à la FunocXFormation pour l'université ouverte de Charleroi. Le moment de faire le point ? Pourquoi pas !

40 années de FUNOC. Une carrière ? Bof. Un sacerdoce ? Non. Une vocation ? Peut-être. Un engagement ? C’est certain. Un engagement envers qui ? Des hommes et des femmes. D’ici et d’ailleurs. Leur point commun : la plupart n’ont jamais tiré la carte chance au Monopoly de la vie.
Au début des années 80 et 90 (au siècle passé), on disposait de très peu d’outils adaptés à l’apprentissage pour des adultes en situation précaireXfragile, qui n’est pas sûr, pas stable et en grande difficulté de lecture/ écriture. L’Essentiel s’est donc imposé tout naturellement comme un outil indispensable pour la formation. En tant que formatrice, j’ai adhéré dès le début au projet, comme d’autres collègues de la FUNOC. Lydia découpait des articles sur l’actualité du moment dans la « vraie » presse. (Pas de recherches sur Internet à l’époque car pas d’internet). Des articles d’ordre social, culturel et politique que l’on choisissait par affinité. J’avais complètement oublié l’article présenté ici. Je me rappelle principalement avoir écrit des articles sur l’assassinat d’André Cools en 91 et sur les accords interprofessionnels.
Je me souviens que la plus grande difficulté pour moi, après avoir lu tous les articles sur le sujet, était d’en écrire un nouveau de sorte qu’il soit compréhensible pour des lecteurs débutants, bien sûr, mais aussi qu’il permette la réflexion et le débat dans un groupe en formation.
Un article qui place les stagiaires au centre du débat, qui les questionne et leur permet de confronter les opinions de chacun. Un exercice de démocratie en quelque sorte. Dans le but d’ouvrir la voie vers le sens critique, la tolérance et la solidarité.

Sur cette photo d’il y a 30 ans, on la voit en compagnie de Myriam Toussaint, son binôme de toujours. Cette photo a été prise dans la salle du personnel de la FUNOC à Gilly (l’actuel secrétariat).
Selon moi, un des grands points forts de l’Essentiel, et qui transcende son contenu depuis qu’il existe, est le traitement positif de l’information. Qu’il s’agisse de l’actualité la plus sombre ou de faits les plus graves, les articles s’efforcent de montrer que des solutions existent et qu’un monde meilleur est possible. Mais depuis, qu’est-ce qui a changé ? Pas grand-chose.
Trente ans plus tard, on n’a jamais réellement fait toute la lumière sur l’assassinat d’André Cools. Les négociationsXdiscussions pour arriver à un accord interprofessionnelles, quant à elles, amènent encore et toujours les syndicats à mener d’âpres combats pour la défense des droits des travailleurs.
Et, récemment, les loups font à nouveau une tentative de retour. Oh pas ceux qu’on peut apercevoir dans nos belles Fagnes, mais ceux (ou presque les mêmes) qui sont entrés dans Paris dans les années 40.
Pas de quoi se réjouir effectivement, en plus de cette satanée crise sanitaire qui nous pourrit la vie et nous freine depuis 2 ans déjà. Il semble que L’Essentiel n’ait donc pas encore écrit son dernier mot et que le futur lui réserve encore bien du boulot.
Du boulot : des lettres, des mots, des phrases à assembler pour expliquer, questionner, confronter, éveiller, inciter… dans l’intention et l’espoir d’un grand remplacement : celui d’un monde inégalitaire et souvent discriminatoire pour un monde plus juste, inclusif et bienveillant (à chacun son grand remplacement après tout !).
Un monde meilleur ! Un fantasme ? Bof. Une utopieXidée qui ne semble pas réalisable ? Non. Un engagement ? C’est certain. Une illusion ? Peut-être. Mais comme dit l’écrivain Colson Whitehead dans son roman Underground Railroad, basé sur la réalité historique de la condition des esclaves en quêteXle fait de chercher pour trouver quelque chose ou quelqu'un que l'on veut, exemple: la quête du bonheur. de liberté dans l’Amérique des années 1850 (liberté qui semblait tellement illusoire sur le moment) : « Une illusion utile vaut mieux qu’une vérité inutile. »
A méditer ! Bon anniversaire à L’Essentiel et à toute son équipe !

Avec malice, Daniella signait cet article sur le festival de Cannes
Daniella Casagrande (de la Floquette à Velaine-sur-Sambre, à 1222 km de la Croisette à Cannes).