lundi 22 juillet 2024

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Loi Frontex, le mauvais réflexe

En Belgique, les députés viennent de voter une loi qui permet à des gardes européens d’aider la police belge à contrôler et expulser de force des migrants en situation irrégulière. Ces gardes sont de l’agence européenne Frontex. Une agence souvent accusée de ne pas respecter les droits des personnes contrôlées, arrêtées et expulsées. Les associations qui défendent les droits humains sont inquiètes.

Pour empêcher l’immigration irrégulière et refouler les migrants illégaux, l’Union européenne a créé en 2004 une agence de garde-frontières et de garde-côtes. Une agence connue sous le nom de Frontex. Jusqu’à présent, les gardes agissaient aux frontières de l’Union européenne. Ils vont maintenant pouvoir agir aux frontières des Etats membres.

Loi Frontex

En Belgique, les députés ont voté une loi qui autorise les gardes de Frontex à aider la police belge à contrôler, arrêter et expulser de force des migrants en situation irrégulière. Les gardes agiront dans les aéroports (comme Zaventem), dans les ports (comme Anvers), dans les gares (comme à Bruxelles-midi à cause du train international Eurostar). Ces gardes seront armés.

Des associations qui défendent les droits humains sont très inquiètes. Parmi ces associations, il y a la Ligue des droits humains (anciennement Ligue des droits de l’homme), Amnesty international, le syndicat FGTB, le Mouvement Ouvrier Chrétien, des associations de défense des migrants. Elles disent même « s’alarmer de cette loi ». Pourquoi ?

Ces associations ont peur que les gardes soient parfois violents et ne respectent pas les droits fondamentaux de la personne migrante. Officiellement, Frontex surveille les frontières de l’Union européenne et lutte contre les passeurs criminels qui demandent beaucoup d’argent aux migrants. Elle le fait, mais elle ne fait pas que cela. Frontex refoule parfois des migrants demandeurs d’asile. Elle les met même parfois en danger. Pourtant, Frontex doit officiellement respecter les droits humains fondamentaux.

Frontex sans complexe

Aux frontières de l’Union européenne, les garde-côtes de Frontex en Méditerranée ne secourent pas toujours les bateaux de migrants qui risquent le naufrage. Les garde-côtes de Frontex collaborent aussi avec les garde-côtes de Libye pour empêcher les migrants de quitter ce pays. Pourtant, il est prouvé que les garde-côtes libyens sont coupables de viols et de violence contre les migrants. L’ancien directeur de Frontex, Fabrice Leggeri est d’ailleurs accusé de crimes contre l’humanité pour la façon dont Frontex refoule les migrants. Il est aujourd’hui candidat aux élections européennes pour le Rassemblement national de Marine Le Pen, parti français d’extrême droite.

Tout cela n’est pas rassurant. En Belgique, les députés de la majorité ont quand même voté la loi « Frontex » proposée par le gouvernement Vivaldi d’Alexander De Croo. Et ils ont voté cette loi malgré le communiqué des associations de défense des droits humains qui disait: « Le gouvernement Vivaldi a été un des pires que nous ayons connu sur les questions migratoires, de respect des droits humains et de l’État de droit. Un vote en faveur de cette loi serait la touche finale à une législature qui se sera honteusement distinguée et que nous n’oublierons pas.» 

Le contexte

C’est vrai que le bilan du gouvernement Vivaldi n’est pas très positif en matière d’immigration. Remettons dans le contexte. La Belgique a été condamnée des milliers de fois (10 000 fois !) par la justice belge et européenne pour son mauvais accueil des demandeurs d’asile. Malgré les promesses du gouvernement début 2023, il n’y a toujours pas assez de places dans les centres d’accueil pour les demandeurs d’asile. 3 600 demandeurs d’asile sont dans la rue.

Le gouvernement Vivaldi et le parlement n’ont pas discuté de projets pour régulariser les migrants sans-papiers. Et on assiste toujours à des situations absurdes. Dernièrement, une migrante travaillant comme accueillante d’enfants dans une école du Brabant Wallon a été arrêtée et conduite dans un centre fermé. Malgré un comité de soutien des parents d’enfants et des habitants, elle n’a pas eu d’autorisation de séjour…

La loi Frontex est la dernière loi discutée et votée par les députés du parlement belge avant les prochaines élections du 9 juin prochain. Il faut espérer que le nouveau parlement et le nouveau gouvernement feront mieux pour les migrants…

Lire aussi La Belgique, un pays hors-la-loi

Il y a 11 ans, des associations de défense des droits humains ont fait une campagne contre Frontex appelée Frontexit. Voici le clip vidéo de cette campagne. Terrible et toujours d’actualité!


Frontex, de quoi être perplexe

L’agence européenne des garde-frontières et des garde-côtes est le « bras armé » de l’Union européenne pour surveiller, contrôler et refouler les migrants. Le budget de Frontex a explosé en 20 ans. Créé en 2004, Frontex avait un budget de 6 millions d’euros. Il est de 845 millions aujourd’hui. En 2004, 750 personnes travaillaient pour Frontex. Il y en aura 10 000 en 2027. Face à la montée en puissance de Frontex, il y a de quoi être perplexe. Autrement dit, on peut se demander si c’est une bonne chose ou une mauvaise chose, en tout cas, pour les droits humains.

Historique

Jusqu’en 1997, chaque Etat de l’Union européenne contrôlait lui-même ses frontières. En 1997, l’Union européenne crée l’espace Schengen. L’espace Schengen regroupe presque tous les Etats de l’Union. Les Etats commencent alors à coopérer pour mieux surveiller leurs frontières. En 2004, l’Union crée l’agence européenne de protection des frontières. Cette agence s’appelle en abrégé : « Frontex » pour « Frontières extérieures ». C’est une véritable armée qui surveille les aéroports, les frontières terrestres et les frontières maritimes de toute l’Union européenne. Frontex, ce sont des officiers, des soldats, des garde-côtes qui ont des avions, bateaux, hélicoptères. Evidemment, l’Union européenne a trouvé une bonne excuse pour justifier Frontex : la lutte contre les passeurs, ces trafiquants d’êtres humains. Mais depuis sa création, Frontex a arrêté et refoulé des dizaines de milliers de migrants. Et elle n’a arrêté que quelques centaines de passeurs… Dans la réalité, Frontex a été créé pour empêcher l’immigration illégale. Et pourtant qui connaît Frontex ?

Une armée clandestine

Avec le sauvetage des bateaux « fantômes », on a un peu entendu parler de Frontex. Mais comme le disent certains parlementaires européens : « Frontex, c’est une organisation presque clandestine». Frontex est une agence officielle de l’Union européenne mais elle n’est pas contrôlée démocratiquement. Les soldats de Frontex localisent les migrants illégaux. Ils les renvoient dans leur pays d’origine. Ou ils les arrêtent et les mettent dans des camps souvent insalubres. Et ces soldats ne respectent pas toujours les droits de l’homme. L’organisation Human Rights Watch appelle certaines unités militaires de Frontex : « Les mains sales de l’Europe» !

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